Ce que vous verrez dans cet article :
Une transformation organisationnelle bouscule les managers
Une transformation fait passer de rôles hiérarchiques fixes et verticaux top/down vers des mouvements horizontaux de prises d’initiatives, bref : vers du leadership
Le leadership n’est pas une denrée rare ou un miracle : c’est au contraire latent et la transformation consiste à le laisser émerger
Le manager doit donc devenir un leader. D’abord un leader de la transformation, puis un leader de l’organisation lorsque celle-ci a appris à évoluer par elle-même
Sinon, le manager qui ne souhaite pas développer de leadership peut se focaliser sur la responsabilité de sujets techniques ou transverses tels que par ex. de l’expertise, de la RH, des process, du PMO/budget…
Pourquoi la transformation ?
Lors d’une transformation d’organisation, les middle managers peuvent être perturbés, voire malmenés. Nous allons essayer de comprendre pourquoi et comment y remédier, ou du moins ce que cela ouvre en opportunités.
Tout d’abord, pourquoi une transformation ? Les raisons explicites d’une transformation tournent en général autour de l’amélioration des performances du delivery (livrer plus, plus vite, moins chère et de meilleure qualité) et plus récemment de l’amélioration de la pertinence de ce qui est fabriqué : plus utile, plus en ligne avec des besoins réels, générateur de plus de bénéfices, etc.
Il peut aussi exister des raisons implicites comme améliorer une ambiance passablement toxique (entre deux départements par exemple), alléger la structure, repositionner des gens, améliorer l’intégration entre différents sites (offshore, Near shore, province, etc.)
Le management est impliqué par les objectifs explicites et souvent ciblé par les objectifs implicites.
Les impacts sur les managers
Quoi qu’il en soit, une transformation remet en question - par construction - des positions, des périmètres ou des attributions pourtant parfois anciennes et reconnues. Cela peut être difficile à vivre pour les personnes concernées et ainsi provoquer des résistances fortes. Les managers sont alors vus comme des obstacles à la transformation. Des obstacles aux gains de performances ou de pertinences. Et se pose la question de leur réorientation.
Management et leadership
D’un autre côté, il est démontré que les leaders, au contraire d’être des freins aux évolutions, en sont les moteurs. Après tout ce sont des leaders, des personnes qui emmènent les autres vers autre chose, vers mieux. M. & A. Sahota dans leur livre « Leadership beyond change » ou Marty Cagans rappellent que “the company cares about what the leader cares about.”
Alors bien sûr, manager ne veut pas dire leader et réciproquement. On attend parfois le manager dans un rôle de contrôle ou de filtrage des alertes. C’est-à-dire quelqu’un qui va conserver la stabilité, au contraire du rôle de leader qui fait bouger les choses et mène le changement.
En somme, les leaders vont tirer la transformation, et celle-ci va faire naître de nouveaux leaders. Par exemple, de nouveaux rôles comme Scrum Master ou Product Owner, permettent à des individualités d’émerger, de piloter et d’engager les équipes, dans un nouveau cadre de travail.
Les managers, eux, selon leur rôle et pour résoudre des injonctions parfois contradictoires - vont plutôt chercher à maintenir la stabilité.
De manager à leader
Là on voit poindre une idée qui peut vraiment rendre tout le monde gagnant : la transformation est l’opportunité de devenir un leader. Un moteur du changement. Cela peut être aussi l’opportunité de lancer des évolutions qui paraissent importantes au manager, mais que sa fonction même ne permettait pas avant la transformation. Par exemple faire évoluer des chefs d’équipes, introduire de nouvelles façons de faire, etc.
Cette opportunité de leadership est accessible à chacun. Souvent nous demandons des volontaires pour être Scrum Master par exemple. C’est ouvert. Voire ça se fait de façon opportuniste « Je vois que tu animes spontanément les Daily, pourquoi ne pas être le SM ? ».
Cette opportunité de leadership est aussi ouverte aux managers ! Et il est clair qu’ils sont en position favorable pour la saisir. S’ils se positionnent comme PM ou RTE/SM ou Tribe Lead, etc. On leur donnera leur chance. Ils ont normalement la reconnaissance des équipes et du senior management.
Qui plus est, nous avons farouchement besoin de leaders internes pour non seulement embrayer la transformation, mais pour en maintenir les effets à long terme. La transformation étant en réalité continue puisqu’elle initie une dynamique d’amélioration continue. Que les managers évoluent en leaders est sans-doute la clé d’une transformation réussie.
Et si on ne souhaite pas être leader ?
A la question initiale “Que deviennent les managers dans une transformation ?” je réponds : des leaders. Ok. On trouvera toujours des rôles pour formaliser la position, ou plutôt le mouvement.
De deux choses l’une. Soit la transformation a pour buts d’améliorer la performance du delivery (plus, mieux et moins cher) ou la pertinence des produits (plus d’utilisateurs, de CA, moins d’attritions) et elle est vraiment l’initiation d’une capacité de l’organisation à évoluer d’elle-même, à s’améliorer. Dans ce cas, la transformation va nécessairement générer des leaders et aussi va transformer des managers en leaders (oui, les deux mon capitaine). Et les rôles sont ceux décrits par Scrum, SAFe, UnFix, as you want…
Soit la transformation a pour but d’alléger la structure, de réduire les strates, de réduire les coûts. Dans ce cas il y a aussi initiation d’un mouvement mais malheureusement vers l’extérieur.
Mais dans les deux cas, le manager en tant que position très stable ayant pour fonction de filtrer les alertes pour protéger le senior management et de fixer les collaborateurs n’est plus de saison.
Et si un manager ne souhaite pas ou n’arrive pas à évoluer d’une position conservatrice vers un mouvement de leader, que devient-il ? Y a-t-il d’autres options que “l’extérieur”… ? Heureusement oui. Citons quelques possibilités :
- (Re)Devenir Expert. Souvent on est nommé manager parce qu’on maîtrise les techniques, le métier, ce qui est important et utile. Mais l’appellation “manager” est faussée dans ce cas. Mieux vaut préciser et dire “expert” - quitte à garder le “grade” de manager dans la grille RH.
- Prendre un rôle dans la transformation : coach, chapter leader, tribe leader, etc. Là on est complètement dans le cas décrit depuis le début de cet article : le manager opère un mouvement depuis son rôle de “filtre-des-alertes-terrain+relais-des-consignes-top management” - très vertical - vers un rôle plus horizontal de synchronisations.
- Prendre du recul par rapport à la transformation et focaliser sur des fonctions d’accompagnement RH (orienter les collaborateurs sur des formations, suivre et évaluer leurs performances) ou sur des fonctions de surveillance, comme PMO par exemple : suivi des budgets, alertes en cas de dépassement, évaluation des risques, etc.
- Prendre un rôle de suivi transverse, peut être en évoluant vers d’autres activités. Par exemple suivre un sujet transverse (on peut parler d’Epic Owner) plutôt que manager une équipe.
En fait se distinguent 3 possibilités principales pour un manager : 1) devenir un des leaders de la transformation, puis de l’organisation. 2) focaliser et suivre des sujets, des process. 3) remettre en question son appartenance à l’organisation.
En conclusion
La question du rôle des managers dans une transformation amène donc celle de la création d’un leadership interne pour les uns et de l’accompagnement sur de nouveaux sujets pour les autres.
La question qui suit serait alors : comment faire cela ?
Pour le leadership et d’après mon expérience, il existe très souvent un leadership latent, une envie qui n’attend qu’une autorisation, une « transformation », pour s’exprimer.
Et on peut voir le rôle du coach / de la transformation leader et des frameworks qu’il utilise comme des moyens pour déverrouiller ce leadership latent, y compris celui des managers. Des choses comme les rétrospectives pour lancer des initiatives, les communautés pour évaluer ensemble des initiatives, des démos / revues pour tester ces initiatives… Sont des exemples simples pour être leader, c’est-à-dire « prendre des initiatives ».
Pour la prise en main d’un sujet - d’expertise ou transverse ou encore d’un process - il s’agit souvent d’une clarification. Les personnes étiquetées “manager” peuvent vraiment trouver de la satisfaction à voir leur véritable intérêt pour un sujet reconnu et ne plus avoir à faire semblant d’autre chose.