Je vois fleurir des articles sur la Communication Non Violente (CNV) dans le monde agile, et cela me rend heureux.
C’est un outil magnifique, et pour autant, il n’est pas si évident à utiliser. Les principales frontières limitantes sont l’expression de ses émotions dans le monde du travail, avoir la possibilité de prendre du temps et consacrer du temps en introspection, et avoir envie d’explorer ses propres émotions.
Je pense qu’avant d’aller sauver le monde, charité bien ordonnée commence par soi-même, et en tant que coach, on a ce biais souvent de vouloir aider les autres.
Et si, pour une fois, on découvrait un outil, non pas dans l’intention d’avoir un nouvel outil pour accompagner les autres, mais pour se donner les moyens de mieux vivre nos accompagnements, et du coup, de faire des accompagnements de qualité ?
Photo de Jeremiah Del Mar sur Unsplash
On propose souvent la CNV comme un outil de médiation dans les transformations, pour résoudre des conflits, ou des situations tendues dans des équipes.
J’aimerais apporter une autre possibilité inhérente à la CNV.
En effet, la CNV est souvent vue comme un outil pour améliorer les relations, et est donc portée vers l’autre. J’ai la croyance que si chacun fait déjà sa part, de prise de conscience, de mieux vivre ses émotions, d’être au clair sur ses besoins, et d’être plus apaisé, chacun apportera son bout de paix dans le monde, et le monde sera plus apaisé.
J’aimerais proposer aux coachs qui me lisent, d’imaginer la CNV comme un rituel d’hygiène, un moyen de vous nettoyer en fin de journée, seul ou à deux (parfois c’est agréable d’avoir quelqu’un pour vous accompagner dans un processus d’auto-empathie).
OSBD… Cet acronyme est un résumé assez basique de ce qu’est la CNV. Observation, sentiment, besoin, et demande. Je dirai que ce sont les artefacts principaux qui vous permettent de vivre la CNV. Ensuite, il faut décorer tout cela avec le comment 😀
En tant que coach, je vis chaque jour un certain nombre de choses, qui m’occasionnent de la joie, de la tristesse, de la colère, … Qui peuvent me générer de la démotivation, de la culpabilité, de la remise en question.
Je rentre chez moi parfois avec tout ce bagage, et cela impacte ma vie personnelle, ainsi que la qualité de sommeil.
Mon invitation est de se donner un temps d’auto-empathie. Déclenchez un OSBD pour soi, et avant de quitter son lieu de travail, regarder comment on se sent.
- Premier mouvement, vérifier comment on se sent. Ai-je des tensions, de la colère, de la frustration, une inquiétude, de la culpabilité, du ressentiment ?
- Deuxième mouvement, clarifier l’émotion. Généralement, nous sentons qu’il se passe quelque chose de désagréable, mais nous ne prenons pas le temps d’identifier l’émotion, et nous n’en avons pas forcément l’habitude. Pour vous aider, vous pouvez voir si vous avez une sensation corporelle (serrage de gorge, ventre noué, mal au cœur, …) et vous appuyez sur une liste d’émotions (en la parcourant vous voyez laquelle vous parle ou non).
- Troisième mouvement, revivre l’interaction qu’il y a pu avoir, source de cette émotion, et venir voir ce qu’il vous aurait fallu, pour vivre une émotion plus agréable (compréhension, respect, contribution, faire grandir, partage, connexion, douceur, bienveillance…).
Le fait d’identifier ce dont nous avons besoin, ou ce que nous aurions aimé vivre, va nous aider à apaiser ce que nous ressentons ici et maintenant. Pour vous aider, vous pouvez imaginer un moment où vous avez réussi à nourrir ce besoin, ou voir ce que vous pourriez faire dans les prochains jours pour nourrir ce besoin. Osez-vous donner de la douceur.
Prenons un exemple :
“Cet après-midi pendant la réunion, Claudia n’a pas cessé de me couper la parole. Je me sens vraiment énervé. Voilà dans mon corps il y a quelque chose de serré au niveau du cœur, et la gorge nouée car j’ai envie de lui hurler dessus.” En voyant cela, je vois que ma gorge est serrée aussi car il y a de la tristesse présente, et que ma colère me permet de ne pas vivre cette tristesse. J’aurai vraiment aimé pouvoir m’exprimer cet après-midi. Mon premier besoin aurait été de la considération, mais cela, c’est la colère qui me parle. Ma tristesse est liée à quelque chose de plus profond. Il y a quelque chose qui me parle d’autonomie, liberté d’expression. Mais plus important encore, il y a une envie de pouvoir partager mes idées, de faire grandir les autres, de contribuer. Et je sens que c’était cela qui était si important pour moi.
Maintenant, j’ai pris conscience de ce qui se cachait derrière cette colère, et je vois que ce n’est pas du ressentiment envers Claudia, et peut-être que demain je pourrai lui parler, et lui dire que j’ai besoin de pouvoir partager, et contribuer. Je rentre chez moi avec cette idée, beaucoup plus douce, et beaucoup d’apaisement.
En tant que coach agile, je constate que notre profession est constamment stimulante, engendrant toute une gamme d’émotions. Nous ressentons de la passion et de l’excitation, mais également de la tristesse en voyant nos équipes en difficulté, de la frustration lorsque les choses stagnent, de la peur de ne pas être à la hauteur et d’être jugé, ainsi que de la colère de ne pas être reconnu à notre juste valeur.
Prendre le temps de prendre conscience de ces émotions en fin de journée, et peut être de les partager avec un tiers, nous permet de rentrer chez nous en laissant ces émotions là où elles sont censées être. C’est une invitation qui vous permettra sûrement de vivre des moments de meilleure qualité dans notre vie personnelle.
Idéalement, partager cette démarche à deux, avec le soutien mutuel d’une personne de confiance, permet de ritualiser cette pratique et de maintenir une régularité bénéfique.