Dans un monde en constante évolution et dans notre quête continue de croissance personnelle et professionnelle, nous sommes souvent encouragés à apprendre de nouvelles compétences, à acquérir des connaissances et à nous améliorer en permanence. Pourtant, les connaissances et les compétences que nous acquérons peuvent rapidement devenir obsolètes ou contre-productives.
C’est pourquoi il est essentiel non seulement d’apprendre, mais aussi de savoir désapprendre. Désapprendre ne signifie pas oublier ce que nous avons appris, mais plutôt réviser nos croyances et nos comportements afin de s’adapter aux nouvelles réalités.
Notre cerveau et l’inconfort
Le cerveau humain est naturellement câblé pour rechercher la stabilité et la prévisibilité.
Il fonctionne selon le principe de la stabilité neuronale : chaque nouvelle compétence ou connaissance que nous acquérons crée des connexions neuronales solides. En consolidant des schémas de pensée et des comportements répétitifs, le cerveau minimise l’effort cognitif nécessaire pour accomplir des tâches courantes. Par exemple, une fois que nous avons appris à conduire, nous pouvons le faire sans réfléchir consciemment à chaque action. Cette automatisation des tâches permet de libérer des ressources cognitives pour d’autres activités plus complexes.
Cependant, cette même automatisation rend difficile le désapprentissage.
Lorsque nous sommes confrontés à des informations qui contredisent nos croyances établies, notre cerveau doit déployer un effort supplémentaire pour réorganiser ses connexions neuronales. Ce processus peut être non seulement difficile mais aussi désorientant, car il exige de nous une flexibilité mentale que nous ne pratiquons pas souvent. Ce processus est mentalement et émotionnellement épuisant car il remet en question notre vision du monde et notre sentiment de compétence. Aussi, lorsque nous devons désapprendre, ces connexions doivent être modifiées ou même supprimées, ce qui peut provoquer un inconfort significatif.
De plus, notre cerveau perçoit le changement comme une menace potentielle, et ce mécanisme trouve son origine dans notre évolution. Lorsqu’une situation inconnue ou incertaine se présente, le cerveau active le système d’alarme intégré dans le corps humain, notamment l’amygdale, une structure cérébrale clé impliquée dans le traitement des émotions et de la peur. Cette activation est une réponse adaptative qui vise à nous protéger des dangers possibles en amplifiant sa vigilance et en préparant son corps à une éventuelle réaction de “combat ou fuite” via une cascade de réactions physiologiques : une augmentation de la fréquence cardiaque, une libération d’adrénaline et de cortisol (hormones du stress), et une redirection de l’énergie vers les muscles pour permettre une réponse rapide. Bien que ces mécanismes aient été cruciaux pour la survie de nos ancêtres face à des menaces physiques, comme des prédateurs ou des environnements hostiles, ils se manifestent aujourd’hui face à des changements qui ne représentent pas nécessairement un danger physique, mais plutôt une menace psychologique ou émotionnelle. Aussi les études neuroscientifiques montrent que l’inconfort provoqué par le changement active les mêmes circuits neuronaux que ceux impliqués dans la douleur physique. Autrement dit, notre cerveau ne fait pas toujours une distinction nette entre une menace réelle et un simple inconfort lié à l’incertitude.
L’inconfort associé au désapprentissage est également alimenté par la peur de l’inconnu, un phénomène profondément ancré dans notre psyché. Lorsqu’il s’agit d’abandonner des connaissances ou des compétences familières pour en adopter de nouvelles, notre cerveau interprète souvent ce processus comme une forme de perte ou de danger potentiel. Cela peut ressembler à un saut dans l’inconnu, un acte perçu comme risqué et menaçant pour notre stabilité intérieure. Cette peur trouve ses racines dans l’instinct de survie : face à l’inconnu, notre esprit privilégie les certitudes, même imparfaites, à une exploration qui pourrait bouleverser nos repères.
À cela s’ajoute la peur de l’échec, qui joue un rôle tout aussi déterminant. Désapprendre suppose non seulement de remettre en question des croyances ou des habitudes, mais également de reconnaître que certaines de nos actions passées, aussi bien intentionnées soient-elles, pourraient avoir été inadaptées ou erronées. Cette acceptation peut être profondément déstabilisante, car elle touche à des éléments fondamentaux de notre identité : notre estime de soi et notre perception de compétence. Elle s’accompagne parfois d’un sentiment de honte ou d’inadéquation, rendant le processus encore plus éprouvant.
Par ailleurs, ce phénomène est exacerbé par le fait que désapprendre nous plonge dans un état temporaire d’incertitude et de vulnérabilité. Cela revient à accepter que, pendant un temps, nous serons novices à nouveau, ce qui peut être particulièrement difficile dans des environnements où l’expertise et la maîtrise sont socialement valorisées. Ce vide cognitif entre ce que nous savions et ce que nous sommes en train de reconstruire peut être source d’angoisse.
Pourtant, pour évoluer, il est crucial de surmonter cette réaction naturelle et d’embrasser le changement.
Pourquoi désapprendre ?
Alors, si désapprendre est désagréable et difficile, pourquoi vouloir désapprendre ?!
Comme nous l’avons vu, le désapprentissage permet de s’affranchir des limitations imposées par des connaissances obsolètes, des schémas de pensée dépassés et des habitudes contre-productives. Il offre la possibilité de libérer notre esprit des contraintes du passé pour mieux appréhender les exigences du présent et les opportunités de l’avenir.
C’est un moyen essentiel pour rester agile et de s’ouvrir à de nouvelles opportunités dans un monde en constante évolution. En cultivant cette agilité mentale, nous devenons capables de remettre en question nos certitudes et d’adopter de nouvelles perspectives, ce qui est indispensable pour prospérer dans un environnement où le changement est la seule constante, qu’il soit technologique, sociale ou culturel.
En libérant votre esprit des anciennes façons de penser, vous ouvrez la voie à une créativité accrue. Le désapprentissage agit comme un détonateur pour l’innovation : en abandonnant les idées préconçues, vous permettez la fusion d’idées apparemment incompatibles, ce qui peut conduire à des solutions inédites et originales. Cette démarche nourrit un état d’esprit où tout devient possible, favorisant non seulement des avancées personnelles mais aussi des contributions significatives dans des contextes professionnels ou collectifs.
Le désapprentissage est également une clé essentielle pour la croissance personnelle. En renonçant aux bagages inutiles du passé, vous faites de la place pour de nouvelles expériences, de nouveaux apprentissages et un développement intérieur plus riche. Ce processus vous pousse à évoluer, à vous transformer et à explorer des versions de vous-même que vous n’auriez peut-être jamais envisagées.
Comment désapprendre ?
Désapprendre est un processus subtil et exigeant, mais profondément gratifiant, qui peut transformer notre façon d’aborder la vie et le savoir. Ce processus ne se fait pas du jour au lendemain, mais peut être intégré progressivement dans notre quotidien grâce à diverses techniques.
Tout d’abord, pratiquez la réflexion introspective de façon régulière. Prenez le temps de vous interroger sur vos croyances, vos valeurs, vos comportements et vos schémas de pensée. Demandez-vous : d’où viennent-ils ? Sont-ils toujours pertinents dans votre contexte actuel ? Cette analyse critique vous aide à identifier les éléments qui pourraient ne plus être pertinents ou bénéfiques dans votre vie actuelle et qui pourraient être modifiés.
Ensuite, la répétition intentionnelle joue un rôle central, tant dans l’apprentissage que dans le désapprentissage. Les connexions neuronales qui soutiennent nos pensées et comportements se renforcent à travers la pratique répétée, les rendant automatiques avec le temps. Pour désapprendre, il ne s’agit pas simplement d’arrêter ces comportements, mais de les remplacer par de nouvelles pratiques répétées, qui progressivement affaiblissent les anciennes connexions et permettent d’en établir de nouvelles. Ce processus exige non seulement de la patience, mais également une intention claire : il faut savoir ce que l’on veut désapprendre et pourquoi.
Créer un environnement favorable est une autre étape clé. Il peut être utile de s’entourer d’éléments qui encouragent les nouveaux comportements.
Par exemple en favorisant la diversité dans votre vie. Entourez-vous de personnes inspirantes ayant des expériences, des perspectives et des compétences variées. Les interactions avec des individus aux horizons variés stimulera votre propre créativité et vous exposera à des perspectives que vous n’auriez pas considérées autrement. La diversité des expériences et des idées dans votre cercle social peut être une source riche d’inspiration pour désapprendre et innover.
Vous pouvez aussi cultiver une curiosité active et diversifier vos sources d’information. Consciemment, exposez-vous activement à de nouvelles informations, des idées et des perspectives différentes et explorez des sujets en dehors de votre domaine de compétence habituel. Elargissez votre champ de lecture, en suivant des conférences ou des podcasts dans des domaines inexplorés.
Mélangez à ça la remise en question constante, en n’acceptant pas simplement l’information telle qu’elle vous est présentée : Posez des questions, soyez sceptique et explorez des points de vue alternatifs même s’ils contredisent vos propres convictions.
Le jeu de rôle est également une technique puissante supplémentaire. Imaginez-vous dans la peau de quelqu’un avec une perspective opposée à la vôtre. Imaginez ses motivations, ses expériences et ses contraintes, et essayez de comprendre pourquoi elle perçoit le monde différemment. Cet exercice d’empathie cognitive ne se limite pas à la compréhension de l’autre ; il vous pousse également à remettre en question vos propres certitudes. En pratiquant ce changement de perspective, vous pouvez identifier et désapprendre des préjugés ou les stéréotypes qui peuvent entraver l’innovation, stimulera votre empathie et vous aidera à comprendre les motivations derrière des points de vue différents.
La gestion de l’échec est une autre compétence cruciale. Acceptez que l’erreur que l’erreur n’est pas un échec définitif, mais une étape naturelle et même nécessaire sur le chemin de l’innovation. Apprenez à voir l’échec comme une opportunité d’apprentissage plutôt que comme un obstacle. Prenez le temps d’analyser vos échecs passés : qu’ont-ils révélé sur vos méthodes, vos hypothèses ou vos schémas de pensée ? Identifiez les leçons qui en découlent, et soyez prêt à ajuster votre approche en conséquence. Cette mentalité vous aide non seulement à dépasser la peur de l’échec, mais aussi à appréhender l’inconnu avec plus de confiance et d’ouverture.
Comment désapprendre collectivement ?
Désapprendre collectivement est un défi de taille, car il implique de remettre en question non seulement des croyances individuelles, mais aussi des normes, des pratiques et des schémas profondément ancrés au sein d’un groupe. Cependant, cela est possible grâce à des approches appropriées et une culture propice au changement.
Commencez par instaurer une culture de remise en question : Assurez-vous d’avoir (ou de créer) un environnement de sécurité psychologique où il est possible de remettre en question les pratiques et croyances existantes. Cela nécessite de promouvoir une culture où les erreurs ne sont pas stigmatisées mais perçues comme des opportunités d’apprentissage. Encouragez des discussions ouvertes et honnêtes, où chacun peut exprimer des idées nouvelles ou critiquer les pratiques en place sans crainte de représailles.
Ensuite, favorisez la diversité des perspectives : Construisez des équipes diversifiées, elles permettront de confronter les idées dominantes, d’identifier et désapprendre les biais collectifs et d’explorer des alternatives qui ne seraient peut-être pas envisagées dans un groupe homogène. Si vous ne pouvez pas, invitez des personnes ayant des expériences, des compétences et des idées variées à participer aux discussions et aux décisions.
Enfin, mettez en place des processus de réflexion collective : Organisez des ateliers ou des sessions dédiées à la déconstruction des idées reçues et des pratiques établies. Vous pouvez par exemple organiser des rétrospectives régulières, pour analyser les projets passés, identifier ce qui peut être abandonné ou modifié, et encourager un apprentissage continu. Vous pouvez aussi utiliser des techniques comme l’animation de workshops suivants :
- Le Design Fiction invite les participants à imaginer des futurs possibles à travers des récits ou des scénarios fictifs. Cette méthode s’appuie sur des hypothèses créatives pour explorer des idées audacieuses, en simulant l’impact potentiel de nouvelles technologies, politiques ou pratiques dans un monde fictif.
- Le TRIZ (ou la pensée inversée), où les participants identifient volontairement ce qui pourrait aller mal ou ce qu’il faudrait faire pour échouer spectaculairement, puis inversent les idées pour trouver des solutions. Ce renversement des rôles encourage une analyse critique des pratiques actuelles et aide à identifier les points faibles ou les croyances limitantes.
- L’Appreciative Inquiry (Enquête appréciative) qui se concentre sur l’identification et l’amplification des forces et des succès passés pour imaginer un futur positif. Plutôt que de se focaliser sur ce qui ne va pas, cette méthode pousse les participants à explorer ce qui a bien fonctionné, pourquoi, et comment s’appuyer sur ces réussites pour désapprendre ce qui est obsolète.
- Le Crazy 8s, où chaque participant dessine 8 idées en 8 minutes (une idée par minute) sur une feuille divisée en 8 cases. Cette méthode encourager la spontanéité et la diversité des idées.
Chez Reacteev, nous avons conçu un catalogue de workshops variés, spécialement pensés pour accompagner vos équipes dans leurs processus de désapprentissage et d’innovation. Ces ateliers, conçus sur mesure, permettent de stimuler la réflexion collective, de déconstruire des pratiques anciennes et d’adopter des méthodes plus agiles et adaptées aux défis actuels.
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Conclusion
Enfin, il est important de garder à l’esprit que le désapprentissage est un processus continu, et non un événement ponctuel. Les anciennes habitudes, profondément enracinées, peuvent resurgir, surtout dans des moments de stress ou d’incertitude. Mais avec un effort soutenu, de la persévérance et une pratique régulière, il est possible de les transformer durablement. La clé réside dans la bienveillance envers soi-même : accepter que des progrès graduels valent mieux qu’une perfection immédiate.
Car apprendre à désapprendre n’est pas une tâche facile, c’est un voyage continu, mais les avantages de la croissance personnelle, professionnelle et de la créativité en valent largement la peine. Alors, lancez-vous dans ce voyage fascinant, remettez en question vos certitudes, et découvrez le pouvoir transformateur du désapprentissage !
En intégrant ces techniques dans votre vie quotidienne, vous serez mieux équipé pour désapprendre les schémas de pensée obsolètes, ouvrant ainsi la voie à l’innovation personnelle et professionnelle.